Page 157 - Amechanon_vol1_2016-18
P. 157

Amechanon, Vol. I / 2016-2018, ISSN: 2459-2846




























                                           Image 1: l’oubli de l’expérience enfantine

                   L’enfance-manque


                   La première catégorie de représentations est unie autour d’un noyau péjoratif présentant

                   l’enfance humaine de façon caricaturale, dans le cadre de la domination de l’enfant par
                                                                                        220
                   l’adulte  et  de  ce  que  Philippe  Ariès  a  pu  appeler  (partiellement  à  tort )  «l’oubli  de
                   l’enfance», oubli qu’il juge culminant lors de l’époque médiévale en Occident: «il n’y avait
                                                           221
                   pas de place pour l’enfance dans ce monde» . De façon permanente en tout cas, on relève
                   de  multiples  occurrences  d’une  dépréciation  de  l’enfance  dans  la  pensée  des  adultes,
                   toutes époques confondues.


                   L’enfant est tout d’abord assimilé à un petit animal spontanément malfaisant dont il faut

                   se défier et qui se définit surtout par ce qui lui manque pour être adulte: «l’enfance est la
                                 222
                   vie d’une bête» , disait ainsi Bossuet. Le christianisme a, en effet, utilisé tout d’abord une
                   conception de l’enfant comme un être bestial et peccamineux, qu’il fallait baptiser au plus
                   tôt afin de s’assurer qu’il n’était pas une créature diabolique, mi-homme mi-bête satanique.

                   Régulièrement le corps et l’esprit enfantins sont donc comparés des oiseaux sans cervelle,

                   des singes sans élégance, des porcelets sans humanité, etc.



                   220   Pour  une  discussion  sur  la  thèse  de  l’oubli  de  l’enfance,  voir  Dupeyron,  J.,F.,  Nos  idées  sur
                   l’enfance, Paris: L’Harmattan, 2010, pp. 25-34.

                   221
                      Ariès, P., L’enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime, Paris: Seuil, 1984, p. 53.

                   222   Bossuet,  J.,B.,  «Méditations  sur  la  brièveté  de  la  vie  et  le  néant  de  l’homme»,  dans:  Œuvres
                   complètes, tome XII, Paris: Librairie de Louis Vivès Éditeur, 1862, p. 704.



                                                           157
   152   153   154   155   156   157   158   159   160   161   162