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Amechanon, Vol. I / 2016-2018, ISSN: 2459-2846



                   Corsetées de fil de suture chirurgical, présentées à l’intérieur d’un bioréacteur – utérus
                   artificiel; elles symbolisent les peurs de la société face aux biotechnologies et donnent le

                   ton des intentions des artistes qui les utilisent.

                   Le couple d’artistes la présentera à nouveau à l’exposition BioFeel: Art et Biologie en 2002

                   avec Pig Wings Project qui sera également exposé lors de la Biennale d’Arts Australiens
                   d’Adélaïde la même année.


                   Mythologies, récits apocryphes, Évangiles… ont donné lieu à une iconographie riche de

                   personnages ailés. Qu’ils soient anges ou démons, ces créatures chimériques pourraient
                   bien voir le jour; et les cochons, sous les doigts de TC&AP/SymbioticA, se préparent à voler.

                   L’installation  Pig  Wings  à  Adélaïde  présentait  des  «ailes»  cultivées  à  partir  de  cellules
                   souches  prélevées  dans  la  moelle  osseuse  du  porc.  Palpitant  grâce  à  des  cœurs  de

                   grenouilles  récupérés  parmi  les  déchets  d’expérimentations  scientifiques,  ces  ailes  de
                   cochon,  écrit  Jens  Hauser,  «incarnent  l’ironie  à  l’égard  du  marché  des  composants

                   biologiques, avec ses perspectives mirobolantes ouvertes par l’annonce du décryptage du

                   génome humain, car si les ailes existent bel et bien dans la galerie, leur taille laisse à désirer.
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                   Les promesses hyperboliques se réduisent à quelques centimètres carrés…» . Certains
                   échantillons  de  cellules  ont  été  soumis  lors  de  leur  développement  à  des  morceaux

                   musicaux choisis d’après des critères précis (tous les morceaux contenaient des variations

                   étymologiques  du  mot  pig).  Une  différence  quelque  peu  visible  «démontrerait
                   scientifiquement» l’impact des vibrations bénéfiques émises par les titres interprétés.

                   Les ailes «vivaient» depuis environ cinq mois lorsque l’installation eut lieu. Elles ont été

                   maintenues en vie par les artistes une dizaine de jours de plus, le temps de leur présence à
                   Adélaïde. Personne n’étant en mesure de les entretenir; sans «soins», elles étaient vouées

                   à la mort. Il fut alors décidé de mettre fin à leurs jours dans un rituel assassin (The «ritual
                   killing the Pig Wings») durant lequel les visiteurs furent invités à toucher et être touchés

                   par  les  Ailes  de  Cochon.  Exposées  au  toucher  humain,  contaminées  et  infectées  de
                   bactéries  et  champignons,  la  mort  des  Pig  Wings  est  alors  imminente.  Les  rituels  du

                   toucher/tuer  sont  un  moyen  de  faire  prendre  conscience  aux  individus  de  la  relation
                   problématique  qu’ils  entretiennent  aux  entités  Semi-Vivantes  et  par  extension  à  tout

                   l’environnement.


                   59  Hauser, J., op.cit., p. 417.



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