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Amechanon, Vol. I / 2016-2018, ISSN: 2459-2846
Questions de méthode
Ce serait quoi une classe anthropophagique, un apprentissage anthropophage? Dans ce
texte, nous allons explorer l'adoption de la «divise anthropophagique» en tant que
philosophie de l’éducation. Une philosophie anthropophagique de l’éducation est une
sorte de philosophie corporelle de l’éducation; elle ne serait pas seulement une
philosophie de l’éducation absorbant «l’anthropophagie» comme métaphore, mais une
philosophie de l’éducation attentive à des aspects corporels des cultures indigènes,
l’anthropophagie en particulier. Mais c’est quoi l’anthropophagie? C’est d’abord le rituel
où les amérindiens et d’autres indigènes partout dans le monde mangeaient l’ennemie, le
captif, le prisonnier capturé. Et dans les cas des amérindiens, cela n’a été jamais n’importe
quel prisonnier, mais seulement le brave guerrier des peuples ennemis. Il y a aussi d’autres
formes d’anthropophagie parmi des amérindiens. Pourtant nous irons parler ici surtout du
mouvement anthropophage brésilien, un mouvement artistique, culturel et philosophique,
qui a été inspiré pour cette image «sauvage» (et pour lequel nous adoptons le terme
«Anthropophagie» avec un «a» capital). Et qu’est ce que l’Anthropophagie?
L’Anthropophagie, l'un des principaux mouvements culturels, littéraires et philosophiques
au Brésil, est née en 1928, avec le Manifeste anthropophage, écrite par Oswald de
165
Andrade . Écrivain, journaliste, philosophe, né à São Paulo en 1890, Oswald était l'un des
artistes essentiels du mouvement moderniste brésilien. Avec l’écrivain Mario de Andrade,
le musicien Heitor Villa-Lobos, le peintre Di Cavalcanti, et d’autres artistes et intellectuels,
il a organisé la Semaine d’Art Moderne de 1922. Dans les années 1910 jusqu’à 1933, début
de son militantisme communiste, Oswald a fait des longs séjours en Europe avec sa femme,
la peintre Tarsila do Amaral. À Paris, le couple a participé du cercle des artistes Jean
Cocteau, Fernand Léger et Blaise Cendrars. En 1924, Oswald écrit le Manifeste de la poésie
Bois-Brésil, une subversion poétique des récits des premiers voyageurs, missionnaires,
colonisateurs. Le Manifeste anthropophage, l’un des plus importants textes du
modernisme, est aussi l’un des premiers textes à proposer non seulement un regard
radicalement positif sur les cultures amérindiennes, mais aussi une critique de l’Occident
et de la colonisation à partir de la valorisation de l'un des grands tabous de la civilisation:
165 De Andrade, O., «Manifeste Anthropophage», dans: Brésil/Europe: Kiffer A., Nordmann J., F.,
Roque T.(ed.), Repenser le Mouvement Anthropophagique, Paris: CIPH, 2008, p. 4,
www.ciph.org/IMG/pdf/papiers60.pdf
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