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Amechanon, Vol. I / 2016-2018, ISSN: 2459-2846



                   Conclusion: pour une phénoménologie du corps enfantin

                   Ce rapide examen des catégories de représentations de l’enfance en Occident débouche

                   inévitablement sur la reconnaissance de la nécessité d’une approche plus soucieuse de la
                   saisie fidèle du «phénomène» de l’enfance. Autrement dit, c’est d’une phénoménologie de

                   l’enfance dont nous avons besoin.

                   Dans le cadre de ce texte, nous ne pouvons qu’en esquisser certains traits. Elle observe en
                   l’enfant et en son corps la présence d’un principe de vie fondamental qui, selon Nietzsche,

                   ne doit pas cesser de grandit et de se fortifier au cours de la vie. C’est l’enfance-puissance,
                   qui fait dire ceci à Nietzsche: «en l’homme vraiment homme est un enfant caché, qui veut

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                   jouer» . Du coup devenir et redevenir enfant est dans la «nature» du cours d’une vie
                   humaine  affirmative:  «le  fait  est  que  nous  sommes  nous-mêmes  en  croissance,  en

                   perpétuel changement nous rejetons de vieilles écorces, nous faisons peau neuve à chaque
                                                                                                251
                   printemps, nous ne cessons de devenir de plus en plus jeunes, futurs, élevés, forts» .

                   L’enfance  est  donc  ce  potentiel  persistant  d’enfantement  créatif  qui  sourd  de  la  vie
                   humaine et qui justement permet la subjectivation affirmative dans le flux de la réalité.

                   L’enfance est une puissance affirmative, une capacité de résistance aux agressions de la
                   réalité, une qualité créatrice de normes. Il apparaît donc que l’idéal pédagogique du jeune

                   enfant comme sujet doit être complété par une perception de l’enfant comme porteur de
                   cette belle promesse de joie «naturelle» d’apprendre et d’entreprendre, d’agir et de se

                   sentir vivre. Ce corps enfantin porteur de la «Grande Santé» dont parle Nietzsche apparaît
                   avant tout comme un corps émancipé.



















                   250  Nietzsche, F., «Ainsi parlait Zarathoustra», dans: Œuvres Complètes, Paris: Gallimard, tome VI, p.
                   80.

                   251  Nietzsche, F., «Le Gai Savoir», aphorisme 371, dans: Œuvres Complètes, Paris: Gallimard tome V, p.
                   280.



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