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Amechanon, Vol. I / 2016-2018, ISSN: 2459-2846
répond ‘Oui!’ ou ‘Non!’. Mais si je demande:- Quelle est la matière du contrôle?,
‘Oui!’? Ça n´a aucun sens! Si les réponses étaient tout le temps ‘oui’, on n´aurait
même pas besoin de poser des questions!».
Face à cette explication, Esdrubaldina rajoute encore le suivant: «Si les réponses étaient
toujours oui, tout s´appellerait oui! Lorsqu´on me demanderait: -Quel est ton nom?, je
répondrais ‘Oui!’. Tandis que les autres s´étonnent de cette dernière réponse, DeMille
reprend la discussion avec charme et grâce: «Rien ne peut être parfait parce que si tout
était parfait, je suis sûr qu´une des règles serait d´être imparfait». «Comment ça DeMille?»-
demande Jamais très intriguée. «Pour que quelque chose soit parfait il faut suivre certaines
règles. Mais, comme l´une d´entre elles est de devenir imparfait, rien n´est parfait!», «-Rien
est parfait, chaque chose a sa conséquence». – argumente encore Castro Ocular. «Rien
n´est jamais la même chose!» déduit alors Esdrubaldina. «Et si on était tous pareils, si on
était tous Raul André? […]» -questionne encore Uta.
Le texte interprété dans cette scène et restitué dans son intégralité à la fin de cet article
est le résultat d´une composition faite à partir des idées des enfants, qui ont surgi durant
les rencontres de philosophie que j'ai organisées. Toutes les questions posées viennent
d'une dynamique d'échange d'opinions, nées de leurs préoccupations et non d'un thème
ou d'un problème que j'aurais énoncé au début des séances. Ainsi, le texte de la scène
reflète uniquement les questions soulevées par les enfants durant nos rencontres. Il est
surprenant de constater que le questionnement philosophique en jeu traduit en mots les
mêmes interrogations qui sont posées pendant le spectacle à travers le langage de la
performance et qui, comme nous l'avons vu, se rapportent au problème de la différence.
«Et si tout était jaune?», «Et si nous étions tous pareils?», «Et s'il n'y avait pas de différences?»,
«Et si tout était parfait?», etc. Toutes ces questions sont donc venues rejoindre celles qui
constituaient déjà le moteur de plusieurs expérimentations artistiques sous-jacentes à la
création et qui, au moment du spectacle, produisent chez le spectateur un sentiment
d'étrangeté. Souvenons-nous, par exemple, du choix de Silvia Real d'intégrer les «erreurs»
dans le jeu, soulignant ainsi la valeur de la différence, plutôt que de vouloir tout niveler et
rendre parfait. Soulignons que, pendant le spectacle, les idées qui s'enchaînent, à partir de
la première question «Et si tout était jaune?» sont dites avec la même spontanéité que lors
des ateliers. Plutôt que de reproduire ou imiter une séance de philosophie avec les enfants,
un des objectifs de Silvia fut également, comme pour d'autres étapes du processus (par
exemple, fixer les mouvements des danses folles après les improvisations) de conserver
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