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Amechanon, Vol. I / 2016-2018, ISSN: 2459-2846



                   soi-même comme être en formation que l’on peut prétendre aider ceux que l’on éduque à
                   se former pour s’émanciper.


                   Une  pédagogie  qui  entend  lutter  contre  le  racisme  s’appuiera  donc  sur  le  postulat
                   fondamental  de  l’égalité  des  intelligences,  dont  Rancière  trouve  la  formulation  chez
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                   Jacotot . Jacotot opposait la pédagogie traditionnelle, qui postule l’inégalité entre les
                   ignorants (l’enfant-élève, l’élève-peuple) et ceux qui les éduquent (les maîtres savants, les

                   élites éclairées), à la méthode qu’il met en pratique comme pensée de l’émancipation.
                   Rancière commente:


                          «le processus ordonné conduisant l’ignorant et le peuple vers l’égalité promise au

                          terme de leur instruction présuppose en fait une inégalité irréductible entre deux
                          sortes d’intelligence. Le maître ne sera  jamais égalé par l’élève parce qu’il s’est
                          réservé  la  science  qui  fait  la  différence,  et  qui  est  simplement  la  science  de

                          l’ignorance. A cette logique inégalitaire, la pensée de l’émancipation oppose un
                          principe égalitaire défini par deux axiomes: premièrement, l’égalité n’est pas un but
                          à atteindre; elle est un point de départ, une présupposition qui ouvre le champ
                          d’une  possible  vérification.  Deuxièmement,  l’intelligence  est  une.  Il  n’y  a  pas

                          l’intelligence du maître et l’intelligence de l’élève, etc. Il y a une intelligence qui ne
                          correspond à aucune position dans l’ordre social, qui appartient à n’importe qui en
                          tant qu’intelligence de n’importe qui. L’émancipation veut alors dire: l’affirmation

                          de  cette  intelligence  une  et  la  vérification  du  potentiel  de  l’égalité  des
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                          intelligences» .

                   Comment  cette  «vérification  de  l’égalité»  peut-elle  donc  s’opérer?  Certes,  tout  acte
                   pédagogique y participe, mais je vais ici me limiter à formuler quelques préceptes, au sens

                   kantien, dont il importe de s’inspirer pour construire une position éthique compatible avec
                   cette double formation émancipatrice, de soi-même et des élèves pour un enseignant.


                   Les  conséquences  de  l’axiome  de  l’intelligence  «une»  sont  d’abord  l’ouverture  d’une
                   éthique de l’hospitalité, qui accueille les manifestations culturelles dans leur diversité pour
                   peu qu’elles passent l’épreuve de la critique rationnelle. Si l’hospitalité est inconditionnée,

                   elle ne peut cependant pas entrer en opposition avec ce qui la rend possible: l’égalité de



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                      Rancière, J., Le maître ignorant, Paris: Fayard, 1987.

                   270   Rancière,  J.,  «Communistes  sans  communisme?»  dans:  Badiou,  A.,  Zizek,  S.  (édit.),  L’idée  du
                   communisme, Paris: Nouvelles éditions lignes, 2010, p. 232.



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