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Amechanon, Vol. I / 2016-2018, ISSN: 2459-2846
Portrait/Retrait
Pour comprendre le texte ci-dessous, il faut savoir que dans la langue italienne le mot pour
«portrait» est «ritratto». Littéralement: «retrait», «ce qui se retire»...
«Il en résulte que le portrait/ritratto porte ainsi à l’incandescence la problématique
de la représentation ou de la figure: l’extériorité d’une ostentation le dispute à
l’intimité d’une saisie opérée au plus propre. Manifester au dehors et plonger au
dedans sont dans le portrait à la fois contraires et complémentaires...
Tel est le premier enjeu: dans le portrait, dans son portrait - dans son ‘propre’
portrait (expression on ne peut plus ambiguë) - l’autre se retire. Il se retire en se
montrant, il fait retraite au sein de sa manifestation même. L’autre portraituré, c’est
aussi bien l’autre retiré, et par conséquent l’autre reconnu - si la ressemblance vaut
reconnaissance - est aussi bien l’autre rendu plus inconnu qu’avant cette
reconnaissance. Il est plus inconnu parce qu’il est retiré dans son altérité. Mais ce
retrait révèle le mystère de cette altérité: il ne le dévoile pas, il révèle au contraire
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qu’il s’agit d’un mystère - et que sans doute il n’est pas question de le dissiper» .
Conclusion: qu’est-ce qu’un «objet philosophique»? La photographie, un «objet
philosophique»?
Qu’est-ce qu’un objet philosophique?
D’abord, deux façons de l’entendre:
Α.Un objet déjà-là, intramondain, dont je pourrais dire: voilà un objet philosophique!
Β.Un artéfact, une construction, quelque chose que l’on a fabriquée intentionnellement
comme «être philosophique».
A et B peuvent se dédoubler:
Α1: Un objet déjà-là qui «donne beaucoup à penser», qui évoque d’importants thèmes
philosophiques: la vie la mort l’amour la vérité etc.
318 Nancy, J.,-L., L’autre portrait, Paris: éditions Galilée, 2014, pp. 17/18.
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