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Amechanon, Vol. I / 2016-2018, ISSN: 2459-2846



                   à Asclépios. L’éducation corporelle est nécessaire; elle permet un corps sain, car en plus de
                   rendre l’être humain utile à diverses tâches, principalement celle de guerre, elle favorise le

                   développement intellectuel, d’où l’adage, tiré de Juvénal, mens sana corpore sano. C’est la
                   compréhension du logos qui autorise une prescription en faveur d’une meilleure harmonie

                   entre le corps et l’esprit.

                   Cependant, entre l’ordre normatif et l’ordre pratique, il y a un hiatus. Déjà du temps des

                   Grecs, le langage sportif mettait l’accent sur l’importance de gagner à tout prix, car perdre
                   étant une honte. Dans la défaite, surtout à la guerre, plusieurs préféreront se donner la

                   mort au lieu de se présenter comme un looser. La pratique sportive était très individuelle,
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                   souvent brutale, avec un usage de drogues et le recours à des prix faramineux . C’était
                   aussi une culture de l’adulation. On n’a qu’à penser à l’expression «dieu du stade» dans la
                   mesure où le héros était celui qui avait la faveur d’un dieu lorsque ce dernier décidait

                   d’intervenir dans le cours des choses humaines pour le faire gagner. Sans compter que
                   c’était beaucoup plus qu’une simple fête en l’honneur de Zeus; c’était aussi un spectacle

                   offert au peuple.

                   Pour la pensée chrétienne, la nature est une création de Dieu. Le «naturel» dans l’homme,
                   c’est ce qu’il a reçu «en propre lors de la création» et «laissé à la discrétion de sa liberté».

                   Cependant, lorsque la nature est  abandonnée à  elle-même,  elle conduit  «à  la ruine de
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                   l’homme; c’est pourquoi la nature doit être continuellement rabrouée» .

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                   À partir de Galilée, selon la célèbre conférence de Husserl à Vienne, en 1935 , les hommes
                   ne se posent plus les questions du «pourquoi» des choses, mais de leur «comment». Ce

                   faisant, c’est la question du sens qui est évacuée. Le seul monde réel, c’est le monde des
                   idéalités  mathématiques.  Au  départ,  cette  façon  de  concevoir  le  monde  n’avait  de

                   signification  que  méthodologique.  C’est  par  un  glissement  que  cette  réduction
                   méthodologique  est  devenue  une  réduction  ontologique,  de  sorte  que  cette  façon  de

                   penser la nature a ouvert une brèche épistémologique entre la rationalité instrumentale et




                   112  Finley, M.,I., & Pleket, H.,W., 1000 ans de jeux Olympiques, Paris: Perrin, 2004.

                   113  Heidegger, Μ., Questions II, op.cit., p. 179.

                   114  Husserl, Ε., La crise de l’humanité européenne et la philosophie, Paris: Aubier, 1987; voir aussi:
                   Husserl, Ε., La crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale, Paris: Gallimard,
                   1976.



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