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Amechanon, Vol. I / 2016-2018, ISSN: 2459-2846



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                   élevé que celui de [la] vie ordinaire» . Huizinga remarque que «[l]’action reproduit un
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                   événement  cosmique» ,  de  sorte  que  le  «le  jeu  […]  dépasse  les  frontières  de  la  vie
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                   physique» . Ce faisant, comme le note Gadamer, «‘jouer’ c’est toujours ‘être-joué’» .
                   Gadamer, qui s’appuie sur le travail de Buytendijk et Huizinga, dira que c’est «à travers les
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                   joueurs» que le jeu lui-même accède à la représentation . Lorsqu’on observe des joueurs
                   impliqués  avec  le  plus  grand  sérieux  dans  une  activité  ludique,  il  ressort  que  le  jeu  se

                   présente comme un mouvement de va-et-vient sans but. Jouer, consiste à s’insérer dans
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                   un mouvement qui «se fait comme de lui-même» , de sorte que c’est le jeu lui-même qui
                   joue, qui est le sujet du jeu.



                   Le jeu du questionnement philosophique comme ouverture d’un espace de jeu

                   Si nous revenons à notre interrogation sur les activités motrices et sportives, nous avons

                   vu qu’elles sont à risques de devenir des activités aliénantes au lieu de contribuer à notre
                   bien-être, selon si elles déploient leur essence ou pas. Peu importe le jeu, pour jouer, il faut

                   en comprendre les règles, c’est-à-dire l’essence. Sinon, le jeu se transforme en travail et en
                   devoir selon un idéal de perfection.


                   Accéder  à  l’essence  du  jeu  est  l’affaire  de  la  philosophie,  plus  spécifiquement  d’un

                   questionnement philosophique. Si, chez Platon, les philosophes sont les gardiens de la cité,

                   c’est qu’ils s’assurent de l’intégrité des différentes activités humaines. Pour ce faire, il faut
                   que les activités humaines soient toujours accompagnées d’un regard, de commentaires
                   et d’interprétations. Il ne s’agit pas seulement d’être immergé dans le jeu, il s’agit aussi et

                   surtout d’établir une distance qui transforme le joueur en témoin, de la même manière

                   chez Kant le Je s’accompagne toujours d’une représentation. Le jeu doit accéder au statut
                   de spectacle. Sinon, le jeu perd son aspect ludique.




                   136  Huizinga, J., op.cit., p. 36.

                   137
                      Ibid., p. 37.

                   138  Ibid., p. 19.

                   139  Gadamer, H.,G., op.cit., p. 124.

                   140  Ibid., p. 120.

                   141  Ibid., p. 123.



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